Nan, je m'étais pas envolée (et tu crois pas si bien lire). Vacances, naines infectes, grosse fatigue, Noël et tout et tout... Et puis la flemme, aussi. C'est ma meilleure copine, celle-là, elle me quitte jamais.
Bref, je passe un samedi de ouf là, j't'explique même pas, tu t'endormirais d'ennui (le fameux "effet suppositoire" de Dove Attia, tu connais ? Ben là pareil). Du coup je me suis dit qu'il serait peut-être temps que je vienne te conter mon dernier séjour tchèque. Tu vas pas être déçu du voyage (difficilement plus que ce que je l'ai été quoi !)
Revenons donc quelques semaines en arrière... Vendredi 17 décembre, 2h45 du mat'. J'ai mis le réveil à 3h30 mais j'ai déjà les yeux ronds comme des billes. J'appréhende à tous les niveaux, les Craquettes sont du genre imbuvables depuis quelques jours et je sais que la neige fout un bordel monstre question trafic aérien. On se prépare en speed et en se gueulant dessus comme des putois, ça commence bien. Finalement, on arrive à l'aéroport à 5h et des 'cahuètes, chargés comme des mules, mais détendus et souriants. Jusqu'à ce qu'en cherchant notre vol sur l'affichage je constate : LH1062-Frankfurt - Cancelled. Là, j'arrive même pas à chialer. Je me balade pourtant toujours avec un stock assez conséquent de liquide lacrymal sur moi, mais là que pouic. J'me retourne vers Bobby qu'avait pas encore vu, je lui annonce la bonne nouvelle, et là, je lève la tête et je découvre une file d'attente monstrueuse devant le comptoir Lufthansa. Les files d'attente en Russie soviétique à côté, c'était pipi de chat. Bah ouais, évidemment. On n'était pas les seuls à vouloir rejoindre Frankfurt ce matin-là.
Catastrophés, parce qu'en plus le délai pour notre correspondance est un peu short, on se positionne dans la queue, et on attend sagement, avançant d'un demi centimètre par tranches de 45mn. Par chance, Mademoiselle V. s'est endormie dans sa poussette, et Mademoiselle A. fait montre d'une patience exemplaire. C'est assez rare pour être notifié. Pas moyen d'aller s'asseoir, on ne sait pas si on doit se présenter tous les 4 au comptoir, et le peu de chaises pas trop loin sont toutes occupées.
Là, on sait pas ce qui lui prend d'un coup d'un seul, mais un jeune homme Lufthansa assis derrière le comptoir en train de se toucher le kiki depuis 1h30, se lève et parcourt la file d'attente en demandant "Y a-t-il des gens qui souhaitent partir demain ??" Ben oui, bien sûr connard, c'est pour ça qu'on est là depuis 5h ce matin !
Un peu plus tard, un premier scandale éclate. Une dame voyageant en classe éco n'ayant pas compris qu'il y avait un comptoir business et un comptoir pour les pauvres se fait littéralement pourrir par un con de riche (si si, c'était le con de riche de base). Dame Lufthansa Business commence à avoir un peu de mal à garder son calme : elle explose comme un vieux ballon de baudruche et se met à hurler que ça va bien maintenant, que ça fait une semaine qu'elle subit les assauts des voyageurs insatisfaits, qu'elle fait ce qu'elle peut et que ceux qui sont pas contents "ils ont qu'à rentrer chez eux !!!" T'aurais pas dû, DLB. T'aurais pas dû. Parce que Bobby, qui jusque-là avait à peu près réussi à garder son calme, se met à gueuler aussi. Fort, puisqu'à 4m du comptoir. Des petits noms d'oiseau commencent à voler, mais bon, il a raison. Il soulève la question du jeune-homme-qu'est-là-mais-qui-sert-à-rien
-Mais il n'est pas formé en billetterie, monsieur !!
-Alors il pourrait au moins passer dans les rangs pour donner des renseignements, distribuer de l'eau pour les enfants et les personnes âgées, mais pas rester là à se tourner les pouces !"
Ouhlala. DLB s'énerve encore un peu plus et lui rétorque qu'il lui fait perdre son temps. Quoiquoiquoi ? Comment tu parles à Bobby toi, morue, ça va pas ou bien ? Bibiche n'est pas franchement femme à ouvrir grand sa bouche, mais après 2h debout à pousser son bagage du pied et à faire la causette au jeune désespéré derrière qui renvoie à Kiev sa prostipute fraîchement achetée, Bibiche a la tension un peu élevée. Alors Bibiche crie. Fort. Puisque je te le rappelle, à vol d'escargot, le comptoir est maintenant à 3m98. Et Bibiche explique à la connasse (oui, j'ai dit "connasse", c'est probablement un de mes mots préférés, que veux-tu...) que si elle faisait son boulot correctement, et si elle arrêtait de s'exciter sur les clients, elle perdrait moins de temps. Non mais. Connasse. (désolée, c'est pathologique)
La prostipute derrière fait toute une scène à son acheteur parce qu'il faut absolument qu'elle rentre à Kiev. Il lui répond gentiment que c'est pas grave, "Maybe you can get a flight tomorrow", mais horrifiée, elle secoue la tête "No no no !" Tu m'étonnes, il aurait dû me payer cher, moi aussi, pour que j'aie envie de rester. Mais le débat n'est pas là, je ne suis pas Ukrainienne (ni pute, je te vois venir).
Bref, 1h plus tard nous voilà devant le comptoir. J'ai vu qu'il y avait un vol pour Vienne vers 10h... Et il reste de la place. Ca au moins, c'est fait. Le souci c'est qu'il y a 5h d'attente avant la correspondance pour Prague. Rien que ça. Avec 2 enfants en bas-âge, ça nous promet un moment super fendard. Elle cherche, fouine, mais rien de mieux. Là Bobby nous refait un petit coup de sang, mais se contient, serre les fesses et articule calmement, cette fois. Bah elle a pas apprécié, DLP (Dame Lufthansa Pauvres, faut suivre un peu !) C'est là qu'on a apprend qu'elle est là depuis déjà 5h, et qu'elle a eu le temps ni de boire, ni de faire pipi. Information capitale, tu en conviendras. Non c'est vrai quoi. Du coup j'aurais dû lui chanter en teuton que j'avais pas fait caca depuis 2 jours mais que finalement, tout ça redonnait un vrai coup de fouet à mon transit.
Allez, direction l'enregistrement puis l'embarquement. Vol sans encombre. RAS.
Arrivés à Vienne, on se tâte 2mn pour savoir si ça vaut le coup de sortir de l'aéroport et d'aller se balader. Je décide que oui, il décide que non. Je sais pas si tu connais l'aéroport de Vienne, mais 5h là-bas, j'te jure, c'est longuet. Les sandwiches au pain polaire et à la sauce au raifort compensent un peu l'attente et l'angoisse de savoir si notre vol va partir ou non. Mais ça roule. Ou plutôt, ça vole. 18h45 on se pose à Prague. Enfin. Prague mon amour... Ouais mais attends, c'est pas fini.
On se pointe devant l'arrêt de la navette qu'on prend d'habitude. Y'a 3 clampins devant nous, mais on peut y monter à 14, donc ça devrait le faire. Sauf que non. Il passe d'abord à l'autre terminal récupérer des cons de touristes (sale race, le touriste). Et là il nous annonce que "finito, no more shuttle". Il reste de la place dedans, hein. 2 places. Les enfants de moins de 6 ans ne payant pas, ils montent normalement sur les genoux de leurs parents. Mais non. Il préfère faire monter 2 personnes arrivées après nous. Normal quoi. Tant pis, ce sera taxi. Approximativement 3 fois plus cher (et là Bobby demande un edit : "2 fois plus cher, mon bichon, 2 fois !!" Ouais ben c'est pas ma faute, chuis dyscalculique, merde !), mais au point où on en est, on n'a plus le choix et on a hâte d'arriver à l'hôtel.
19h et des 'cahuètes, nous y voilà enfin... Crevés, on décide de ne pas ressortir pour aller dîner. Dvd pour les Craquettes, pc sous la couette pour moi, room service. Aaah, qu'on est bien... On a perdu une journée, mais tant pis, on savoure enfin. Extinction des feux, demain est un autre jour, on se baladera main dans la main dans la plus belle ville du monde et les emmerdes seront loin derrière.
Ou pas.
22h, Mademoiselle A. décide que c'est une bonne heure pour se mettre à gerber tripes et boyaux. Il avait raison, on aurait mieux fait de pas partir... Je retire ses draps et sa taie d'oreiller, je nettoie le sofa qui a ramassé au passage, je tiens la tête de ma fille au dessus des toilettes, je la douche... Ca va mieux. Je la recouche mais dans le lit parapluie, cette fois-ci, que j'ai protégé du mieux que j'ai pu avec des serviettes de toilette.
23h... "Beuah bleuuh bouhrhg" Ah, tiens. Elle avait pas fini. Je retire ce qui est souillé, je l'emmène aux toilettes, je la douche... Bobby nettoie ses fringues à la main. Je la remets dans le lit parapluie avec des serviettes propres. Et ça recommence. Bon, on arrive à cours de serviettes, il en reste 2 propres. Je la couche sur une serviette sur la moquette, et j'utilise l'autre pour la couvrir (elle est à poil, j'ai pas embarqué sa garde-robe complète, je vais pas laver du linge à la main toute la nuit non plus, hein ? Mais si, t'aurais fait pareil !)
Je dors d'un oeil et l'emmène vomir chaque fois que nécessaire. La nuit se finit plutôt paisiblement.
Petit déj, elle a faim. J'adore le petit-déjeuner au Maximilian. Il y a du choix et pis c'est tellement bon... Mais je commence à déprimer sévèrement, j'ai comme l'impression qu'on n'est pas au bout de nos peines. Bingo. Mademoiselle A. lâche une galette sur la table. Bon appétit ! Dobrou chut ! Un serveur se précipite, et a juste le temps de virevolter pour éviter un jet de vomi. T'rappelles la nénette dans l'Exorciste ? Ben pareil. Edit : Fort et courageux, son père la prend dans ses bras pour la remonter dans la chambre et se retrouve couvert de gerbe avant même d'avoir atteint l'ascenseur (ndlr : c'est lui qui vient de réclamer cet ajout primordial, parce que "Comment t'as pu oublier ça ??" Bah... C'est probablement parce que c'est pas moi qui me suis fait dégobiller dessus, en fait !)
Je file à la pharmacie toute proche de l'hôtel. On a du bol que je connaisse ce coin de la ville presque comme ma poche. On a moins de bol que les pharmacies soient fermées le samedi. Illumination, je file au centre commercial pour en trouver une autre. J'explique que ma naine est malade, on me file du smecta. Mouais bon. Pas convaincue, mais c'est tout ce qu'elle me propose. S'ensuit une vraie lutte pour le lui faire avaler (en même temps, rien qu'à la vue de ce truc j'ai envie de me faire hara-kiri, donc je peux pas la blâmer). Et finalement, ça passe. Vomito, on a eu ta peau.
Ou pas.
On installe chaque naine dans sa poussette (on avait eu la présence d'esprit d'en louer une sur place) et nous voilà partis en balade. Il fait froid, mais rien d'insupportable. Jolie balade dans les rues, l'esprit de Noël est partout, le sapin sur la place de la Vieille Ville est immense, c'est superbe. Il y a même un enclos avec des animaux. Je propose à Mademoiselle A. d'aller voir de plus près : "J'ai pas envie, j'm'en fiche". No comment. Elle a passé le séjour à nous répondre qu'elle avait pas envie. Déception, colère, incompréhension. C'était pourtant un voyage superbe qu'on leur offrait là. J'ai fini par en prendre mon parti. Dès qu'on sortait, elles s'endormaient instantanément dans leur poussette. Au moins on avait la paix. Tant pis pour elles, après tout, Bobby et moi pouvions toujours en profiter. Et on en a pris plein les yeux. Prague sous la neige, c'est époustouflant. Bon, ça l'est de toute façon. Mais la neige donne encore à la ville une autre dimension. Qu'il neige, qu'il pleuve ou que le soleil brille elle est à chaque fois la même, mais en mieux. Vas-y je te dis, tu comprendras. Tiens, regarde...
Mais attends, c'est pas fini ! Je me laisse emporter par la nostalgie mais il faut quand même que tu saches que le dimanche, c'est Mademoiselle V. qui s'est dit qu'elle aussi, elle vomirait bien un p'tit coup. Par chance, ça nous a pas trop empêchés de sortir, elle avait le dodo tellement facile dans sa poussette... Puis bon, une fois que Number Two a eu fini d'être malade, c'est Number One qui s'y est remise. Et le pater, aussi. Ben oué ! Nan, t'as vu, on fait pas les choses à moitié. Pis on s'aime, alors on partage tout, c'est bien normal, après tout.
Le lundi soir, lasse de cette ambiance vomitive, je propose à ma douceur de printemps une petite balade mère-fille. Même qu'elle accepte avec enthousiasme (note, c'est miraculeux). Me voilà dehors avec elle, lui expliquant où on est, quel est ce grand bâtiment imposant, lui proposant de s'arrêter ici et là pour faire quelques jolis clichés. Elle se prête au jeu bien volontiers, et mon coeur se réchauffe. Et je nous imagine de mieux en mieux, installés ici dans un loft sur les Champs Elysées tchèques. Ouais bon, ça va, on a le droit de rêver, hein. Allez, elle l'a bien mérité, arrêtons-nous chez Sparky's, ZE magasin de jouets, avec un super toboggan trop kiffant à l'intérieur (tatata, j'te vois venir, les toboggans c'est fini pour moi, désolée, j'ai pas testé !) Quelques achats plus tard, on reprend le chemin de l'hôtel, main dans la main, heureuses et légères.
Puis vient le mardi. Notre vol décolle à 19h, mais stressée, je vérifie régulièrement son statut sur le site de la compagnie. Je regarde à 9h05, ouf, il est maintenu. A 9h09, toujours, c'est bon ! 9h18, ok. 9h22, c'est bon ! Puis je vérifie une dernière fois, avant de sortir. ANNULE. Panique, larmes, cris. Excessive, moi ? Essaye un peu de te taper un séjour pareil, on verra si tu te sens toujours déborder d'optimisme et si t'as envie de chanter la Carioca avec une plume dans le cul.
J'appelle la Lufthansa à l'aéroport, en larmes. La fille est super et nous reclasse sur un autre vol. Beaucoup plus tôt, et avec un timing short pour la correspondance. mais c'est pas grave... Aujourd'hui c'est mon anniversaire, j'ai envie de passer une journée détendue du slip et on aimerait surtout rentrer chez nous. Je passe rapidement sur l'épisode du petit déjeuner, au cours duquel Mademoiselle A. après avoir fini son chocolat chaud, a jugé bon de remplir sa tasse vide... de vomi...
Dernière promenade, derniers clichés, le coeur un peu lourd malgré tout, mais notre home sweet home nous attend.
Aéroport de Prague, enregistrement, achats de dernière minute, embarquement. Sauf que non. On sait pas pourquoi, mais ça traîne. On finit par embarquer avec environ 45mn de retard. Et une fois à bord, on ne décolle pas. On reste plus d'une heure sur place, sans savoir ce qui se passe. Je me remets à pleurer (c'est là qu'intervient mon stock de liquide lacrymal, tu vois, ça sert toujours !), on a loupé notre correspondance, c'est évident. Par chance, on a rencontré 2 business men tchèques absolument top moumoute. Ils m'ont même aidée à ramasser le vomi de Number Two avant l'embarquement. Ah oui, je t'ai pas dit ? Ben si. Malade. Comme un chien. Donc, Number Two dégueule pendant tout le vol jusqu'à Munich. Une hôtesse passe, me voit en larmes, me demande ce qui m'arrive. Entre 2 sanglots et un filet de mucus que je ne me fatigue même plus à essuyer, je lui explique que notre correspondance pour Nice est sûrement déjà partie, que mes filles sont malades et que là ça commence à faire beaucoup. Elle me rassure tant bien que mal, en me disant qu'au pire on sera logés à l'hôtel à Munich et que j'aurai qu'à appeler un médecin pour les petites. T'as raison, en fait j'ai strictement aucune raison de saturer. Morue.
Munich. Correspondance loupée à 20mn près. 2h d'attente pour savoir à quelle sauce on va être mangés. Les 2 zouzous tchèques font la queue avec nous, leur vol aussi leur est passé sous le nez. Ils nous font rire. Heureusement qu'ils sont là. Le moindre geste amical de leur part me fait fondre en larmes. Je crois que je ne les oublierai jamais, ils ont été un soutien formidable en cette fin de voyage tumultueuse. (Au passage, il me semble sympa de préciser que la gestion à Munich est toute autre qu'à Nice : distribution d'eau et de nourriture, et chaises à diposition...)
Comptoir. Relogés au Sheraton, dîner et petit-déjeuner offerts, vol pour Nice le lendemain matin. Tout va bien. On est épuisés, mais on revit. On file faire 3 courses (notre valise n'est pas récupérable avant Nice), et je dois dire que l'aéroport de Munich est vraiment parfait. Supermarchés, boutiques, cafés... Il y a absolument tout, et en plus, il est beau. Si, si, c'est important. Tu verrais la gueule de l'aéroport de Nice, tu comprendrais pourquoi je relève.
Navette, hôtel, boeuf bourguinon plein la panse (eh, c'était offert on a dit !) Et repos, enfin. Une nuit de sommeil pas franchement réparatrice, mais qu'importe, demain, on rentre et dans 3 jours, c'est Noël...
Enfin, tu vois, chez moi, on appelle ça avoir la poisse. Ca coupe un peu l'envie de partir en voyage. Un peu, j'ai dit. Déconne pas, je repars quand même dans 2 semaines, en tête à tête avec ma Môman. Pas à Prague, cette fois. Changeons un peu, soyons fous !
On a passé des vacances absolument abominables, dans le stress, et dans la douleur pour certains (note que moi j'ai pas été malade, ou à peine), alors qu'on s'imaginait passer un séjour idyllique. Malgré tout... J'ai envie de dire que ça valait le coup de ramasser du vomi et de se heurter à des murs.
Rien que pour ça... ça valait le coup...